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Le Costa Rica, un Pays sans Armée

Le Costa est un des rares pays au monde à ne pas posséder d’armée, ce qui lui vaut le surnom de « Suisse d’Amérique Centrale ». Mais pourquoi le Costa Rica n’a-t-il plus aucune force militaire?

1. L’Election Présidentielle du 8 Février 1948:
2. La Guerre Civile :
3. La Suppression de l’Armée :

1. L’Election Présidentielle du 8 Février 1948 :

Le 8 février 1948, une élection présidentielle fera couler beaucoup d’encre, et bien plus encore de sang…

Otilio Ulate Blanco recueille la majorité des suffrages. Le tribunal électoral reconnaît sa victoire, et il devient officiellement Président du pays… très provisoirement ! Car la majorité sortante, qui avait présenté à l’élection Teodoro Picado Michalski, exige l’annulation des résultats, arguant de prétendues fraudes.

Teodoro Picado Michalski

Teodoro Picado Michalski © Gomez-Miralles

Le tribunal devait se prononcer avant le 28 février et finit par refuser la requête, jugeant les élections conformes à la législation. Le parti présidentiel se tourna alors vers le Congrès Constitutionnel. Qui invalida l’élection très peu de temps après, le 1er mars… Décision logique, puisque le congrès était constitué en majorité de communistes et de membres de la majorité « calderoniste » (les proches du président sortant, Teodoro Picado Michalski, lui-même proche de l’ex président Rafael Ángel Calderón Guardia).

Pour être précis, il faut dire qu’en effet certaines zones d’ombre entouraient cette élection. Le tribunal électoral a déclaré Ulate Blanco vainqueur en se basant sur les télégrammes envoyés par les différents bureaux de vote, sans attendre la confirmation officielle du résultat du comptage manuel des votes. Or un sinistre d’origine inconnu a fait partir en fumée l’immense majorité des bulletins de vote, rendant invérifiables les résultats officiels. L’incendie était-il criminel, comme on peut le supposer, et orchestré par le président sortant ou un autre candidat peu scrupuleux, comme on peut l’imaginer ? Personne ne le sait…

Ulate Blanco, soupçonné d’avoir lui-même organisé la fraude, est placé en détention, malgré l’appui de l’archevêque Victor Sanabria Fernandez et de l’ambassadeur des USA (qui parviendront tout de même à le faire libérer). Cet affront manifeste envers la démocratie est très mal perçu par la population, et une véritable guerre civile se produit.

2. La guerre civile :

La principale figure de ce conflit est, José Figueres Ferrer, un simple fermier, qui prend les armes pour défendre la liberté de son pays. Il faut dire que Ferrer a une dent contre le gouvernement… En effet, lors d’une allocution radiophonique le 8 juillet 1942 dans laquelle il dénonçait la corruption et l’intimidation orchestrée par le gouvernement de Rafael Ángel Calderón Guardia, il fut arrêté en pleine émission et passa quatre jours en prison avant d’être contraint à l’exil. C’est depuis le Mexique qu’il apprend la nomination de Teodoro Picado Michalski et décide de rentrer au pays.

José Figueres Ferrer

José Figueres Ferrer © Dcc1000

Le 12 mars 1948, il fait de sa ferme une base armée qu’il rebaptise La Lucha (La Lutte), et fait des quelques hommes qui acceptent de l’épauler spontanément la Legión del Caribe (littéralement la légion des caraïbes).

Le même jour, un chef d’entreprise du nom de Francisco José Orlich Bolmarcich a la même idée. Il créé un autre front plus au nord du pays. Grand bien lui en a pris par ailleurs ; il deviendra président du pays en 1962

Ferrer et sa légion parviennent à s’emparer de Cartago, San Isidro del General, Puerto Limón… Le président Michalski veut alors négocier, et envoie une délégation officielle au collège San Luís Gonzaga, fief et quartier général du chef de la légion.

Ferrer veut la reddition du gouvernement, et propose trois leaders en guise de chefs : lui-même, bien entendu, Alberto Martén Chavarría (fondateur et président du groupe Action Démocratique), ou Fernando Valverde Vega (délégué du bataillon León Cortes, basé à San Isidro). Michalski refuse, et propose un autre marché, disons moins honnête…

Le président propose de céder le pouvoir contre la nomination à la tête du pays de Santós León Herrera (proche de Calderón Guardia puisqu’il a été son président du conseil électoral de la république), Francisco Calderón Guardia (le frère de l’ex président) ou René Picado Michalski (son propre fils!).

Le 16 avril, le Nicaragua est appelé en renfort par le gouvernement, et envoie sa garde nationale sur place. Mais les soldats ne font pas le poids face à la détermination de Ferrer, et le 19 avril, la dernière bataille de ce court conflit aura lieu à San Isidro del General. Calderón Guardia fuit alors le pays, et va se réfugier au Nicaragua, oubliant ses espoirs de reprendre la tête du Costa Rica. Quant à Michalski, il fuira dès le lendemain après avoir remis le pouvoir entre les mains de Santós León Herrera.

Pour information, Ferrer et Blanco conclurent un pacte d’alliance. Ferrer devint chef du gouvernement pendant une période de transition de 18 mois, avant de s’effacer et de laisser la place à Blanco. Lequel finira par devenir président du pays en 1949 (juste retour des choses puisqu’il était sans nul doute le véritable vainqueur des élections de l’année précédente).

3. La suppression de l’armée du Costa Rica :

Mais les conséquences de cette guerre iront bien plus loin qu’un simple remaniement politique. Près de 1.000 personnes ont trouvé la mort durant ce conflit… Et il était impensable de laisser une telle chose se reproduire.

Le Costa Rica, pays sans armée

Le Costa Rica, pays sans armée © Alex_Mac – Fotolia.com

Ainsi, le 1er décembre 1948, José Figueres Ferrer, plus communément appelé Don Pepe, fait voter un décret-loi abolissant l’armée. Pour donner plus de force à sa décision, il se rend à la caserne de Bellavista (aujourd’hui musée national) en plein cœur de la capitale, et armé d’une masse, il donne un coup symbolique dans l’un des murs. Il venait de détruire l’armée. Cette scène historique est d’ailleurs représentée sur les billets de banque de 10.000 colones.

Des pactes de non agression et des accords de protection furent conclus, et de nos jours, le Costa Rica peut compter en cas de conflit sur l’aide des USA et du Brésil, et sur la neutralité du Nicaragua (qui rappelez-vous avait voulu soutenir le gouvernement de Michalski).

Un contingent de policiers remplace l’armée régulière. Ils sont 14.000 actuellement selon le Ministère de l’Intérieur. Grosso modo un policier pour 360 habitants (contre 1 pour 460 en France). Et les effectifs ne cessent d’augmenter.

Quant au budget alloué anciennement à l’armée, il a été réaffecté, et permet chaque année de financer l’ensemble des universités du pays et trois de ses principaux hôpitaux.

Preuve qu’un pays peut parfaitement se passer d’une armée, et même ne pas s’en porter plus mal, au contraire.

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